Pourquoi fêter un jubilé sinon pour donner à Dieu la Parole en relisant notre existence, la mienne en ce jour…
Ces moments où m’a été révélée sa Présence, comme après coup, « En vérité, le Seigneur est en ce lieu ! Et moi, je ne le savais pas. » (Genèse 28,16) ou lorsque le flot me submergeait « comme un oiseau nous avons échappé au filet du chasseur ; le filet s’est rompu : nous avons échappé » (Ps.123, 7) ; ou quand sa force m’a mise au large : « Heureux les hommes dont tu es la force : des chemins s’ouvrent dans leur cœur ! » (Ps.83, 6) me faisant chanter : « Comment rendrai-je au Seigneur tout le bien qu’Il m’a fait ? » (Ps 115,12)
50 ans pour naître à ma vie intérieure, car comme le dit Saint Irénée, « Ce n’est pas toi qui fais Dieu, mais Dieu qui te fait. Si donc tu es l’ouvrage de Dieu attends la main de l’Artiste, qui fait tout en temps opportun par rapport à toi qui est façonné… »
Née à Lyon, en décembre 1945, mes parents sont partis pour l’Espagne lorsque j’avais un an et ma sœur 3 ans. Même si on parlait français à la maison, j’ai été imprégnée par cette culture qui m’a ouverte à d’autres mentalités et par la suite, aux pays hispanophones d’où venaient beaucoup de nos sœurs. Pensionnaire à Lübeck à l’âge de 11 ans j’ai goûté combien l’Assomption prenait soin de chaque personne, l’aidant à grandir en liberté et en responsabilité dans un climat de joie. C’est là qu’à une rentrée des classes, rangeant mes affaires dans un tiroir, j’y découvris un petit parchemin écrit à l’ancre de chine avec une Parole flash : « Mihi vivere, Christus est! Pour moi, Vivre c’est le Christ ! » Elle me bouleversa, se plantant en moi pour étendre ses racines, jusqu’à s’inscrire dans l’alliance que je porte aujourd’hui encore. Il y eut aussi cette parole inspirée d’un prêtre entrevu lors d’une retraite aux élèves de 2nde : « Geneviève, vous n’avez jamais pensé à être Sœur ? » elle fit jaillir une eau vive, celle de l’Esprit qui court aujourd’hui encore dans mes veines ! Bien plus tard, après mes études et mes deux années d’enseignante spécialisée, un voyage en Terre Sainte mit le sceau d’une alliance nouée avec le Seigneur. Je rentrai peu après le 1er novembre 1971 à l’Assomption, à Auteuil en cette « mère maison » où je faisais mon noviciat et mes 1ers vœux le 6 août 1973, entourée de Sœurs d’une session internationale, où les chants latino-espagnols battaient leur plein ! Le Mystère choisi ? Non, on est plutôt choisi(e), attiré(e) du dedans par un désir profond, et un peu de folie aussi ! Ce fut la Trinité, comme le suggère le dessin, la main du Père engendre le Fils, l’Esprit d’amour est l’engendrement, avec le Christ, je suis engendrée par le Père dans l’Esprit-Saint, « car tous dans le Christ Jésus, vous êtes fils de Dieu par la foi. » (Galates 3,26)
Il m’a fallu un long parcours pour déplacer mon centre de gravité et découvrir que ma seule force venait de Dieu. Comme Sainte Marie-Eugénie le partageait dans une conversation :
« Quand on est jeune on fait tout le contraire de ce qui doit être fait : on appuie sur soi la pyramide de sa perfection, et c’est sur Dieu qu’il faut l’appuyer…C’est une heure bien précieuse dans la vie que celle où nous commençons à comprendre que nous ne pouvons rien par nous-mêmes et que nous pouvons tout par Dieu. Voilà le fondement de notre Espérance… » (28/01/1864)
Ma force, mon souffle, mon énergie, ma vie profonde, je la reçois de Dieu et vivre consciemment de ce décentrement change tout ! L’Assomption offre ce bel équilibre d’une vie contemplative, fraternelle et apostolique, qui donne à la vie sa plénitude. S’exercer à la confiance, travailler pour la justice, vivre en paix, d’abord avec mon prochain le plus proche mes sœurs, est une tâche et un défi à reprendre chaque jour !
Pour conclure, gardons au cœur la fin de la citation de St Irénée de Lyon: « Présente à Dieu un cœur souple et meuble, et conserve la forme que l’Artiste t’a donné ; tu possèdes en toi l’eau (l’Esprit) sans laquelle, en te durcissant, tu perds l’empreinte de ses doigts. En gardant cette conformité, tu monteras jusqu’à la perfection, car l’art de Dieu dissimulera en toi la glaise »
Sœur Marie-Geneviève
Communauté de Bordeaux